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20 juillet 2014

Lettre au président de la République française .

Par Maâmar Farah
Oui, Monsieur, vous avez le droit de faire ce que vous voulez dans votre pays. Vous avez le droit d'interdire une manifestation publique parce qu'elle contredit votre position officielle dans ce lointain «conflit» qui n'a rien d'une bataille entre deux forces égales mais prend les allures d'une boucherie perpétrée contre une population civile coincée dans un petit espace ayant l'une des plus fortes densités au monde ! Oui, Monsieur, vous avez le droit de rompre avec ce qui faisait la clairvoyance, la solidité et la justesse d'une position française jadis indépendante et nullement obligée de s'aligner sur celle du CRIF ou, pire, de cette LJD —pourtant interdit aux Etats-Unis et en Israël — qui a provoqué, selon plusieurs témoignages, les heurts de la rue de la Roquette qui justifient aujourd'hui votre refus de laisser les Français dire haut et fort leur écœurement face à ce qui s'apparente à l'un des épisodes les plus sanglants du nouvel Holocauste ! Oui, Monsieur, vous avez le droit de continuer à dire que vous êtes encore socialiste, au moment où des militants israéliens de gauche manifestent au cœur même de Tel-Aviv et disent que leur pays a fait trop de mal aux habitants de Ghaza.
Monsieur, êtes-vous encore de gauche ? Ce n'est pas à nous qu'il faut répondre, mais à ces millions de Français qui ont placé leur confiance en vous et qui sont chaque jour un peu plus déçus. Le pouvoir vous grise et vous fait oublier certainement vos fondamentaux. Relisez Jean Jaurès. Vous en avez le temps, entre deux réceptions au cœur de cette Afrique qui n'est plus sous perfusion coloniale. La gauche, Monsieur, essaye toujours de se placer du côté du peuple; son essence même, ses motivations, ses aspirations, sa doctrine, c'est l'engagement pour l'égalité, pour la justice. Nous laisserons le soin aux Français de dire si vous êtes encore du côté des travailleurs et des ménagères pour relever que, sur le plan international, vous êtes pire que la droite. Vous voilà plutôt engagé aux côtés de la Terreur en Syrie : si vous en avez le temps, parcourez les images et les vidéos que postent vos amis de là-bas, ceux qui massacrent des paysans, tuent des chrétiens, violent des Syriennes isolées, pillent, saccagent et «mangent» même les cœurs de leurs adversaires... Dans votre aveuglement à vouloir imiter les Américains dans leurs basses œuvres en Irak, vous êtes obnubilé par votre désir d'en finir avec El-Assad. Pourtant, «nos» dictateurs, de Saleh à Ben Ali et de Moubarak à Bachar, n'ont jamais atteint ce stade de l'horreur car les crimes de ces abominables brigades islamistes rappellent les atrocités du IIIe Reich. Si votre prédécesseur s'en sort avec le triste privilège d'avoir ensanglanté la Libye qu'il a plongée dans l'abîme des guerres sans fin et des massacres à répétition, l'Histoire dira demain, et sans aucune complaisance, que vous avez été l'un des soutiens actifs aux nouveaux Pol Pot du Proche-Orient. Le peuple syrien vous en voudra pour toujours. Et le peuple palestinien saura désormais que vous êtes l'ami de son bourreau. Les âmes lucides auront l'éternité pour se poser cette question : pourquoi, dans un cas comme dans l'autre, êtes-vous du côté des assassins, des sadiques et des destructeurs ?
Non, vous n'êtes plus de la gauche. Vous n'avez plus rien à voir avec les grands noms de ce mouvement, ces hommes qui ne faisaient pas de la politique pour se soûler de pouvoir mais pour concrétiser les grands principes de justice, d'égalité, de promotion sociale de leurs concitoyens démunis et de soutien aux peuples en lutte contre l'occupation ou l'arbitraire de ces pouvoirs que vous considérez comme amis. Vous n'avez rien à voir avec ces Français fidèles aux valeurs de la Révolution française et qui viendront, malgré tout, à la manifestation pro-palestinienne pour signifier au monde que la Commune et la Bastille ne mourront jamais dans les cœurs des petits-enfants de Victor Hugo. Non, Monsieur, il ne s'agit pas de refaire la Révolution : elle a porté ses fruits en habillant votre beau pays des couleurs magnifiques et tenaces de la démocratie et de la liberté. Ces valeurs, vous en êtes le gardien et lorsqu'elles sont piétinées, comme vient de le faire votre ministre de l'Intérieur, c'est vers vous que les regards se portent : oui, on peut considérer qu'il y a risque de dérapage et, par conséquent, changer l'itinéraire et renforcer le dispositif sécuritaire d'une manifestation ; oui, on peut faire beaucoup de choses quand on a envie de les faire. Mais cette interdiction vous arrange car la sortie massive des Français allait prouver au monde que votre politique de soutien à l'agresseur n'est nullement partagée parce qu'elle s'inspire de fausses valeurs, celles d'un alignement qui, au sommet de l'Etat et invariablement sous la gauche ou la droite, marque de son empreinte votre philosophie et vos décisions. Interdire est un mot que des démocraties proches de la vôtre ont décidé de bannir. Il ne reste à la traîne que cette France jadis pionnière ! Comme dans les républiques bananières. Et les «troubles à l'ordre public» auront toujours bon dos. Nous en savons quelque chose ici et d'ailleurs n'est-ce pas la France officielle qui martelait le 13 mars 2014 à propos de l'interdiction des manifestations du mouvement Barakat à Alger : «Le droit de manifester pacifiquement fait partie des libertés fondamentales et nous espérons que ces libertés de base seront respectées en Algérie comme partout ailleurs dans le monde»?
Ce jour-là, vous donniez une leçon de démocratie à un gouvernement du tiers-monde. Si j'étais au ministère des Affaires étrangères, je ne me priverais pas de vous rendre la pareille, en faisant dire à notre porte-parole : «La France vient d'attenter au droit de manifester pacifiquement, qui fait partie des libertés fondamentales et nous espérons que ces libertés de base seront respectées en France comme partout ailleurs dans le monde.»
Je ne suis pas au pouvoir et M. Lamamra, notre ministre des AE, pourrait me répondre que l'affaire ne concerne pas l'Algérie et qu'elle est strictement française. Barakat aussi était notre affaire à nous. Alors, un conseil, Monsieur : la prochaine fois, levez les yeux vers votre bosse avant de vous fendre de textes truffés de valeurs que vous êtes le premier à transgresser.
Je serais injuste si je ne terminais pas par un salut fraternel et chaleureux à cette majorité de Français qui, dans la rue ou dans l'intimité familiale, font part de leur dégoût des méthodes israéliennes et expriment leurs sentiments de solidarité aux enfants de Ghaza. Cette opinion qui reste mal informée et manipulée par des médias pas du tout «neutres», aurait pu croire que ses dirigeants avaient raison de remuer les cieux de la République pour mettre au silence l'«antisémite» Dieudonné si, justement, cette nouvelle interdiction n'était pas venue leur prouver que, face au petit spectacle d'un humoriste ou au grand spectacle de l'horreur, leurs dirigeants, leur justice et leur presse n'ont plus la capacité de juger par eux-mêmes les événements qui mettent en cause une communauté et un pays précis, ni à prendre les décisions justes.
Seraient-ce les fantômes du passé et les remords du collaborationnisme qui rendent cette France inapte à retrouver sa lucidité ou l'engagement volontaire, lucide des partis institutionnels à se ranger automatiquement du côté d'Israël, pour des considérations que les Français découvriront un jour ? Je ne crois pas qu'il faille se morfondre dans les regrets à propos d'une phase historique délicate dont nous préférons retenir, et à jamais, les moments épiques d'une résistance courageuse et héroïque ! C'est cette France de la résistance et de l'espoir que nous voudrions retrouver. Tout sera possible alors parce que nos relations ne reposeront plus entre les mains de dirigeants alignés sur la grande finance internationale et les multinationales, mais sur le puissant socle d'une amitié et d'une fraternité à toute épreuve entre nos deux peuples. Un autre pouvoir français pourra peut-être comprendre qu'il porte sur ses frêles épaules un passé qui a illuminé les siècles par ses valeurs authentiques et leur influence dans le monde et que c'est tourner le dos à ce passé que de se tailler des postes secondaires de serviteur zélé d'Israël ou de simple relais de la politique dictée par les faucons de Washington.
Monsieur, la France retrouvera peut-être demain son identité et sa grandeur. Mais certainement sans vous et vos bataillons de censeurs !
M. F.

Source : http://www.lesoirdalgerie.com/articles/2014/07/20/article.php?sid=166120&cid=26

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