La récolte de blé chute de moitié.

Par Zouhir MEBARKI - Mercredi 30 Juillet 2014 -

Notre ministre de l'Agriculture ne parle pas de sécheresse. Il n'emploie pas ce mot. Il parle de «stress hydrique qu'a connu le pays durant les mois d'avril et mai derniers». Pourquoi il dit cela? Pour nous annoncer la baisse de la production céréalière de cette année. Le «stress» a dû être très fort poaur faire passer la production de 49,1 millions de quintaux l'an passé à seulement 30 millions (c'est le chiffre donné par le ministre) cette année. 20 millions de quintaux de perdus, c'est énorme. C'est d'autant plus inexplicable qu'en 2009, notre production avait atteint 61,2 millions de quintaux. Plus du double de la production de cette année. Nouri est bien gentil, mais avec un tel écart, il lui faudra chercher autre chose pour expliquer cette catastrophe. Un taux de production qui nous ramène à l'époque d'avant la batterie d'incitations et de facilitations que l'Etat accorde aux agriculteurs, mérite plus de réflexion. On a l'impression qu'il y a comme un retour à la case départ. C'est carrément inadmissible. Avec un tel taux à la baisse, on pense aux retours sur investissements comme disent les financiers. Disons plus simplement que le déficit est lourd par rapport à ce qui a été mis en termes de produits et de moyens. L'information est d'une gravité majeure. Elle remet en question toute la politique menée jusque-là tendant vers l'objectif de la sécurité alimentaire. Il faut dire que cette annonce a eu lieu en même temps que le crash de l'avion au Mali. C'était jeudi dernier, en marge de la clôture des travaux du Sénat, que le ministre a jeté la «bombe». Le bruit du crash au Mali a été plus fort. Il n'est cependant pas trop tard pour se réveiller et dire non à la catastrophe céréalière. On ne joue pas avec un produit aussi stratégique que le blé. On ne joue pas avec l'avenir de tout un peuple. Sa production de blé qui baisse de moitié et qui n'occasionne pas plus de souci qu'un petit «stress» pose un véritable problème de gouvernance. D'autant que notre économie prend l'eau de toutes parts. Les importations augmentent à vue d'oeil. En quantité et en valeur. Notre rythme de production est ridicule. Dernier exemple. Les douanes nous informent que les importations de l'habillement ont augmenté. Rien d'extraordinaire comme on le disait juste avant. Mais là où cela fait bondir de colère, c'est lorsque la même information fait référence à la demande nationale en chaussures qui s'élève à 70 millions de paires par an alors que la production nationale ne dépasse pas 1 million de paires annuellement. Comment font les Chinois pour créer autant d'entreprises et d'usines privées alors qu'ils sortent à peine du collectivisme communiste. Où ont-ils trouvé les réflexes de la libre entreprise? Ne peut-on pas copier leur «alchimie»? 69 millions de paires de chaussures qui attendent celui ou ceux qui voudraient bien les fabriquer chez nous et gagner un argent fou. Et personne pour ramasser une telle «moisson» d'argent. C'est tout de même bizarre. De toute évidence, il y a des blocages. A quel niveau? C'est dans cette direction que Nouri devrait chercher pour relancer sans tarder la récolte 2014-2015 des céréales. Plus globalement, Bouchouareb nous a promis une nouvelle loi sur les investissements à la rentrée. Il faut espérer que cette fois c'est la bonne. Pour qu'on puisse fabriquer nos chaussures, nos habits, nos cuisinières, nos frigos. Pour qu'on puisse le faire en partenariat avec toutes les marques qui existent dans le monde pour échapper à la position dominante (près du monopole). Le seul secteur économique qui se porte bien dans le pays est celui de l'importation. Des importations au pluriel puisque nous importons pratiquement tout. Il ne faut pas être un grand économiste pour comprendre où se trouvent les blocages de la production nationale. Il n'y a que Nouri pour croire qu'un petit «stress» peut anéantir toute une récolte!

Source : http://www.lexpressiondz.com/edito/199280-la-recolte-de-ble-chute-de-moitie.html